mardi 21 décembre 2010

Note d'intention

Régis Jauffret disait « [qu’on] peut écrire un roman d’une page ou de trois mille », mais quelque soit sa longueur un roman est un objet fini, un artefact. Que le processus duquel découle sa production soit de l’ordre de l’art, de l’artisanat (de l’artisanat d’art, il paraît que ça existe) ou de l’industrie de masse, que sa matière brute soit de l’ordre du rêve, du vécu, du sentiment ou de la formule mathématique (magique peut être) ne change rien. Un roman est achevé.

A l’intérieur, et au delà du roman, il y a l’histoire (avec un « h » minuscule). L’histoire d’un roman a certes un début et une fin, mais n’a rien d’achevée. Entre ces deux points extrêmes et inexprimables tout est flou. On voyage dans une histoire comme à travers un champ de brume, guidé parfois par les lumières de ce qu’on raconte. Ecrire un roman c’est cristalliser les brumes de l’histoire en objet, personnage, action etc. en la racontant. C’est la contraindre à s’accorder dans les mots.

Bien sûr pour le comprendre il faut faire l’effort de ne plus penser en terme de chronologie et de causalité, sans quoi on se retrouve à croire que les histoires existent indépendamment de celui qui les raconte et antérieurement au moment où elles le sont.

L’embryon d’une histoire c’est le soufflet duquel sortent ses brumes. Ce qui lance la machine. Une série d’éléments qui, mis ensemble, lui donnent vie. Une fois l’histoire lâchée, ils disparaissent, se fondent dans la masse des éléments qui la compose. Certains restent solides, pour peu qu’on les raconte, d’autres s’évaporent, ne restent que soupçonnés.

Concevoir une histoire c’est réunir ces éléments dans un même espace imaginaire. Tisser entre eux les liens qui permettent d’en faire une histoire qui se développe alors d’elle-même, comme un système indépendant, se nourrit, à l’extérieur, de ce dont elle à besoin pour grandir et se débarrasse, dans l’oubli, de ce qui l’encombre. Et ce jusqu'à ce qu’elle soit assez mature pour être racontée.

Le but de ce blog est d’attraper des histoires, au stade embryonnaire, et de les congeler là, jusqu'à ce qu’un cerveau fertile les adopte, les réchauffe et les fasse grandir, ou que les serveurs de Google ne les écrasent.